Alimentation : changer de comportement pour allonger l’espérance de vie

Alimentation

C’est prouvé scientifiquement : une alimentation nutritivement pauvre et déséquilibrée entraine une dégradation de l’état de santé et réduit l’espérance de vie. Le surpoids et l’obésité en sont notamment les conséquences les plus fréquentes. La surcharge pondérale est en effet associée à plusieurs pathologies graves pouvant entraîner des décès prématurés. Heureusement, des solutions existent, à commencer par un changement de comportement alimentaire, accompagné par un suivi médico-diététique.

Le lien entre alimentation et santé n’est plus à prouver. Une équipe de chercheurs de l’université norvégienne de Bergen a même établi qu’une alimentation saine permettait d’augmenter significativement l’espérance de vie. Cette étude, publiée en février 2022 dans la revue PLOS Medicine, montre qu’un « régime optimal » riche en légumineuses, céréales complètes, fruits à coque, fruits et légumes, et pauvre en viande, peut faire gagner plus de dix ans d’espérance de vie à un individu nord-américain âgé d’une vingtaine d’années (10,7 ans pour une femme, 13 ans pour un homme) par rapport à un régime alimentaire occidental moyen, où la consommation de féculents, de produits laitiers, de viande et de produits transformés est plus importante.

L’alimentation, élément clé de la longévité

Selon ces résultats, le seul fait d’augmenter sa ration alimentaire de légumineuses à 200 grammes par jour permettrait de gagner un peu plus de deux ans d’espérance de vie à l’âge de 20 ans, tout comme le fait de manger plus de céréales complètes et de fruits à coque. « L’existence d’un effet progressif est un message intéressant à retenir : ce n’est pas tout ou rien », observe Mathilde Touvier, directrice de l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (EREN, Inserm-Inrae-CNAM-université Paris-XIII). « Si on part d’une consommation de zéro fruits et légumes, à chaque portion ajoutée, on a un bénéfice pour la santé ». L’autre bonne nouvelle est qu’il n’est jamais trop tard pour prendre de bonnes habitudes alimentaires. Changer d’assiette pour un régime optimal à 60 ans pourrait faire gagner jusqu’à huit ans d’espérance de vie, et si le changement a lieu à 80 ans, le gain espéré est encore de trois ans et demi.

Ainsi, la recette de la longévité passe par notre alimentation. Pour calculer cet impact, spectaculaire, les auteurs ont analysé la base de données du Global Burden of Disease (GBD), un programme mondial de recherche en épidémiologie de l’Institute for Health Metrics and Evaluation de Seattle (États-Unis), auquel collaborent 7 000 chercheurs dans le monde. Dans un article publié par le prestigieux hebdomadaire médical The Lancet en avril 2019, les équipes du GBD avaient estimé qu’environ 11 millions de morts prématurées par an dans le monde (soit une sur cinq) étaient attribuables à une mauvaise alimentation… Plus que le tabac (8 millions de morts par an). Aux premiers rangs des facteurs de risque : une consommation excessive de sel, un apport insuffisant en céréales complètes et une ration quotidienne trop faible en fruits. «.

Réduire les risques de maladies chroniques associés au surpoids

Une alimentation saine contribue en effet à réduire nettement les risques de maladies chroniques, d’accidents cardiaques, de diabète et de cancer. Une autre vaste étude scientifique, également publiée dans The Lancet en juillet 2016, avait en effet établi « de façon certaine que le surpoids ou l’obésité sont associés à un risque accru de décès prématuré ». Selon son principal auteur, Emanuele Di Angelantonio, de l’Université de Cambridge, « en moyenne, les gens en surpoids perdent un an d’espérance de vie, les personnes modérément obèses trois ans, et les personnes atteintes d’obésité sévère perdent environ dix ans d’espérance de vie. Les risques de maladie coronaire, d’accident vasculaire cérébral, de maladie respiratoire et de cancer sont tous augmentés ».

Une analyse de données menée par les chercheurs de l’Institut national du cancer américain a également montré que les personnes souffrant d’une forme sévère d’obésité ont une réduction spectaculaire de leur espérance de vie par rapport aux personnes de poids normal. Les sujets les plus en surpoids peuvent ainsi perdre jusqu’à 13,7 ans d’espérance de vie. Les décès prématurés sont principalement dû à une maladie de cœur, au cancer, au diabète ou à une maladie rénale ou hépatique.

Selon les prévisions de l’OCDE, entre 2020 et 2050, le surpoids et l’obésité seront ainsi à l’origine de 462 millions de cas supplémentaires de maladies cardiovasculaires et de 212 millions de nouveaux cas de diabète dans les 52 pays étudiés. Près de 60 % de tous les nouveaux cas de diabète seront en effet dus au surpoids, ainsi que 18 % des maladies cardiovasculaires et 8 % des cancers. Dans les 52 pays de cette analyse, il y aurait environ 3 millions de décès prématurés par an dus au surpoids. Ce qui entraînerait un recul de l’espérance de vie moyenne de 2,7 ans.

Une prise en charge personnalisée et pluridisciplinaire à long terme

Selon l’Inserm, « l’objectif de la prise en charge de l’obésité est d’améliorer la santé. Une perte de poids durable de plus de 10 % du poids total améliore un grand nombre des complications associées à l’obésité (diabète de type 2, hypertension, stéatose hépatique, maladies cardiovasculaires, apnée du sommeil), ainsi que la qualité de vie. Maintenir une perte de poids durable est le principal défi de la prise en charge de l’obésité. Comme toutes les maladies chroniques complexes, l’obésité dépend de facteurs variant d’une personne à l’autre et sa prise en charge nécessite une approche personnalisée et multidisciplinaire à long terme ».

C’est sur cette approche, à la fois personnalisée et pluridisciplinaire, qu’est par exemple conçue la méthode RNPC (Rééducation Nutritionnelle et Psycho-Comportementale), qui a déjà pris en charge dans ses 115 centres en France quelque 100 000 patients en surcharge pondérale, en relation avec leur médecin traitant, afin d’améliorer leur état de santé. Pour Rémy Legrand, le concepteur de ce suivi médico-diététique dont l’efficacité a été prouvée par trois études cliniques, « le programme RNPC est une thérapeutique à part entière, qui s’inscrit dans le long terme pour un changement durable du mode de vie et l’atteinte d’un nouvel équilibre et de nouvelles habitudes alimentaires et comportementales. Le programme comprend une phase d’amaigrissement efficace et sûre, avec une perte de poids rapide et suffisamment importante pour améliorer significativement l’état de santé et la qualité de vie des patients, suivie d’une phase de stabilisation pondérale permettant d’inscrire ces résultats dans la pérennité. Une phase dite d’équilibre, optionnelle mais fortement recommandée, permet au patient de ne pas être lâché dans la nature du jour au lendemain s’il estime encore avoir besoin de l’accompagnement diététique et psycho-comportemental ».

L’objectif est atteint au vu des preuves scientifiques. Une étude franco-danoise, réalisée sur 12 000 patients suivant le programme RNPC, a montré que 90 % d’entre eux avaient atteint leur objectif de poids en perdant en moyenne 11% de leur poids initial sur une durée moyenne de 3 à 4 mois. Ceux qui avaient complété toutes les phases du programme (phase de stabilisation comprise) avaient même perdu en moyenne 17 % de leur poids initial sur une durée moyenne de 8 à 9 mois. Des résultats publiés en 2018 dans le journal scientifique Obesity Medecine. « La bonne nouvelle, c’est que les études sur lesquelles nous nous appuyons montrent également que la majorité des pathologies associées au surpoids, si elles sont prises à temps et si le patient perd au minimum 10 % de son poids, peuvent être complètement résolues », confirme Rémy Legrand. L’objectif n°1 est d’écarter les risques de complications graves associées à la surcharge pondérale, et donc d’augmenter l’espérance de vie et l’espérance de vie en bonne santé. Un chemin à prendre, comme l’a confirmé le Professeur Gilles Mithieux à l’occasion du 3e Congrès multidisciplinaire RNPC qui s’est tenu le 1er juillet 2023. Directeur à l’Inserm, il souligne que « perdre du poids va toujours être bénéfique (…). Une perte de poids importante, surtout si elle est rapide au début, va permettre d’avoir des effets de réversion même presque complets de mécanismes qui peuvent être délétères ». Ainsi, ce que nous mettons dans notre assiette est bien tout sauf anodin.

 

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